
Joanna Newsom emploie de façons diverses et variées son instrument de prédilection, la harpe, sur des morceaux tantôt entraînants, comme Plum, Peach, Pear qui ouvre l’album, tantôt calmes, tels que Bridges and Balloons ou Swansea. Il faut avouer que cela permet un certain équilibre entre sa voix, franchement criarde, et le raffinement de la harpe qui introduit une atmosphère plus lyrique bien qu'insolite. L’imaginaire se construit petit à petit, et l’album comporte son lot de petits bijoux si l’on accepte de s’y arrêter un moment. Car au-delà du diablement efficace Plum, Peach, Pear (qui en aura sûrement exaspéré plus d’un), la voix de Joanna Newsom évoque autre chose qu’une gosse de dix ans surexcitée s’essayant aux vocalises pour la première fois. Sur les morceaux les plus calmes tels que Clam, Crab, Cockle, Cowrie ou encore The Side of the Blue, la voix se fait presque timide et libère un certain charme, une espèce de maladresse attachante qui s’accorde étrangement avec l’élégance de la harpe. Pas besoin d'en dire plus, il est de toute façon impossible de se faire une idée sans écouter la voix de la créature. Evidemment, cette musique ne sera pas appréciée de tous, il sera très facile de détester la voix et d’être peu convaincu par l’accompagnement. Il ne sera pas surprenant d’éprouver une certaine répulsion face à une œuvre aussi singulière, tellement insupportable et cependant captivante. The Milk-Eyed Mender n’est pas un album parfait, certains morceaux sont loin d’égaler la beauté féerique de Cassopeia ou la tendre simplicité de Bridges and Balloons (fausses notes ou pas). Mais il y a dans l’univers de Joanna Newsom quelque chose d’envoûtant, il y a dans ce premier album quelque chose de maladroit, d’un peu brouillon (qui est corrigé dans son second album, Ys, au profit de sonorités un peu jazzy et de violons incessants, et d’une voix beaucoup moins agressive). On peut ne pas y adhérer. Mais il sera difficile de rester de marbre devant ce chant pleinement assumé (beaucoup de gens ne savent pas chanter mais ne l’assument pas, comme Scarlett Johansson par exemple, alors ils font des remixs avec beaucoup d’effets). Joanna Newsom ne sait pas chanter, et elle enfonce le clou en s’accompagnant juste d’une harpe ou d’un piano (en live, c’est presque déroutant). Alors, si vraiment cela apparaît hors de portée, presque inimaginable de faire des trucs comme ça, bref à défaut de s’émerveiller devant la qualité artistique de l’ensemble, on pourra toujours s’extasier devant la beauté des textes :
"I do as I please.
Now I'm on my knees.
Your skin is something that I stir into my tea.
And I am watching you and you are starry, starry, starry
and I'm tumbling down, and I check a frown.
Well, just look around. It's why I love this town:
just see me serenaded hourly! celebrated sourly!
dedicated dourly; waltzing with the open sea -
clam, crab, cockle, cowrie : will you just look at me?"
(Clam, Crab, cockle, Cowrie)
Pour ceux qui seraient prêts à mettre leurs oreilles à l'épreuve:
Découvrez Joanna Newsom!
Découvrez Joanna Newsom!
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